Le
courage, c’est de chercher la vérité et de la dire ; c’est de
ne pas subir la loi du mensonge triomphant qui passe, et de ne pas
faire écho, de notre âme, de notre bouche et de nos mains aux
applaudissements imbéciles et aux huées fanatiques.
Jean
Jaurès, Albi, 30 juillet 1903
UNE SITUATION INEDITE
Jamais,
notre Parti ne s’est trouvé dans une telle situation. Nous venons
de gagner les élections présidentielles et législatives. Nous
disposons d’une majorité au Sénat et nous gérons la majorité
des collectivités locales, conseils régionaux, départements et
grandes municipalités.
Avec
de tels atouts, notre Parti est en capacité de répondre aux défis
du pays avec le souci constant de la justice. Nous sommes conscients
de l’impérieuse nécessité de réussir.
Parmi
les attentes de nos concitoyens, nous avons encore beaucoup à faire
pour les réconcilier avec la vie publique. Nous avons affiché des
objectifs ambitieux, en matière de parité, de renouvellement, de
non cumul de mandats, de rénovation du fonctionnement de notre
Parti.
Des
résultats on été atteints, mais la demande de nos concitoyens va
croissante. Avec la crise, la lutte contre les injustices et les
passe-droits revient avec insistance dans leurs préoccupations. Si
la politique n’est pas un coupe-file, il convient de remettre au
cœur du débat une République garante, à tous ses niveaux, du
respect de l’intérêt général.
Le
président de la République issu de nos rangs l’a bien compris qui
a affiché sa volonté de changement de l’organisation de notre vie
démocratique comme sa fermeté à l’encontre de ceux qui abusent
de leurs prérogatives. De ce chantier, il a fait un objectif, sous
l’appellation d’exemplarité, qui vise aussi bien l’individu
que le collectif.
CLIENTELISME POLITIQUE
Ces
derniers mois, un point commun est apparu dans les attaques liées au
fonctionnement d’un certain nombre de nos fédérations.
L’argent
public doit aller à l’intérêt public. Aussi, appelons un chat un
chat. Nous devons désormais considérer le clientélisme politique
comme un cas manifeste de financement illégal par une
instrumentalisation de fonds publics, quel que soit le niveau et les
modalités de leur mobilisation. Les fonds publics ne peuvent plus
servir d’instruments au service d’ambitions politiques
personnelles.
Face
à une dérive majeure de notre vie politique, il nous faut savoir
poser des règles institutionnelles qui empêcheront à l’avenir la
multiplication de ces formes féodales du pouvoir qui vont à
l’encontre de notre pacte républicain.
Ce
chantier, nous devons le conduire avec d’autant plus d’acuité
que la chronique des “scandales” politiques, régulièrement
alimentée, noircit notre horizon de militants politiques. Nous le
savons, les sondages, l’abstention, le vote extrême sont là. La
vie politique n’a pas bonne presse.
NOTRE PARTI
Donner
collectivement un contenu politique à l’exemplarité est une
garantie qui renforce notre Parti dans sa capacité à porter des
projets ambitieux et à faire valoir sa crédibilité à gouverner.
Plus nous serons exemplaires, plus nous serons en capacité de
convaincre nos concitoyens. Cette pédagogie active repose sur nos
pratiques et nos responsabilités individuelles dont les conséquences
sont toujours collectives. Quand un problème se pose, c’est non
seulement notre Parti qui est visé, mais aussi l’ensemble de la
République.
Un
renouveau de la vie politique française est donc de notre
responsabilité.
Trop
souvent, le militant confronté à des pratiques clientélistes se
trouve face à un dilemme insoutenable qui le fait osciller entre
loyauté, défection et prise de parole. Ne mésestimons pas les
ravages de ces dilemmes vécus qui affaiblissent notre Parti quand
rien n’est fait actuellement, ni pour en parler, ni pour trouver
les voies de sorties.
Pour
l’élection majeure de notre vie démocratique, les primaires ont
amené une pratique révolutionnaire, transparente qui empêche
désormais de pouvoir faire valoir ses ambitions dans un cadre
clientéliste. Ce qui s’est déployé au plus haut niveau, doit
pouvoir se déployer aux autres.
Aussi
dans les fédérations concernées, il est important que nous
puissions résolument aller vers de nouvelles pratiques qui tirent
les enseignements des efforts entrepris pour remédier au système
clientéliste.
NOS PROPOSITIONS
POUR REMEDIER AU FLEAU DU CLIENTELISME
Les
quelques points ci-après ne sont aucunement révolutionnaires. Tout
juste peut-on considérer qu’ils transgressent des pratiques
installées et nécessitent d’atténuer les frontières entre élus
et adhérents.
Nos
propositions s’articulent sur une importance accrue donnée au
débat et une pratique d’ouverture plus grande du Parti sur la
société. Pour remédier aux formes variées de clientélisme
politique, il s’agit désormais de traduire au niveau de notre
Parti l’exemplarité que François Hollande a mise au coeur de sa
campagne :
- permettre en toutes circonstances aux adhérents du Parti Socialiste
de s’exprimer sans contreparties personnelles, au nom de nos
idéaux, avec la perspective de l’application stricte des décisions
de la Convention sur la Rénovation ;
- appliquer la limitation du nombre d’adhérents dans une section
pour ne jamais aller au-delà de 150 ;
- obtenir l’engagement des candidats, comme des élus, de mettre en
débat dans leur collectivité un règlement qui encadre et rende
transparente leur action dans les procédures d’attribution de
logements, mais aussi de recrutement et d’avancement des
territoriaux et assimilés ;
- inventer des formes nouvelles de vie partisane ouverte aux nombreux
courants de la société où les sympathisants puissent trouver leur
place et franchir naturellement le cap de l’adhésion ;
- dans cet esprit favoriser au niveau fédéral des formes d’échanges,
de concertation, de primaires qui permettent au parti d’être en
phase avec une société de la connaissance moderne, rajeunie,
féminisée, enrichie de multiples apports ;
- à cet égard, engager au plus vite des débats publics sur les
sujets politiques au coeur des préoccupations du pays et de ses
territoires. L’emploi, le logement et la jeunesse sont des thèmes
incontournables tout comme les grands enjeux territoriaux. C’est le
rôle premier d’une fédération qu’ils soient désormais
partagés par le plus grand nombre. C’est la meilleure des
garanties pour que les décisions soient prises au nom de l’intérêt
général.
Au
niveau de chaque fédération, le(la) première(e) fédéral(e) doit
désormais être choisi comme un(e) primus inter pares pour sa
capacité à incarner cet esprit d’indépendance ouvert sur le
monde du travail, riche d’une expérience à l’intérieur et à
l’extérieur du parti.
A
l’intérieur, il est ainsi indispensable que puisse être mise en
œuvre de façon effective et permanente la Haute Autorité chargée
de faire respecter les règles d’éthique et de droit qui
s’imposent au Parti socialiste et à ses adhérents. Il est
essentiel, afin d’éviter les situations de blocages qu’ont pu
connaître certaines fédérations, que les adhérents, peu
connaisseurs des arcanes du Parti, aient le sentiment de pouvoir être
réellement entendus et considérés.
A
l’extérieur, cet effort sera d’autant mieux reconnu, que nous
proposons, par la Loi, d’instaurer dans la nouvelle étape de la
décentralisation voulue par le président de la République, la
nécessité de systématiquement évaluer la compatibilité de chaque
dépense opérée dans le cadre des compétences générales, au
regard de l’intérêt général.
Par
ces mesures, nous proposons de traduire dans les actes le diagnostic
de la Convention sur la Rénovation : la rénovation du pays et la
rénovation du Parti Socialiste sont intimement liées.
L’EXEMPLARITE
POUR QUOI FAIRE ?
En
période de crise, le danger du simplisme guette, tout comme celui du
populisme. L’histoire comme les pratiques récentes montrent que
nous ne sommes jamais durablement protégés de ces errements. Dire
que l’on doit tout à son Parti, n’est qu’un viatique sans
effet sur les pratiques. Instaurer une culture où le clientélisme
n’aura plus sa place, permettra de faire de l’exemplarité un
moyen de conquête politique.
En
période de crise, Pierre Mendès-France nous enseigne l’absolue
nécessité de dire la vérité aux Français et de ne pas cacher les
efforts que nous devrons collectivement assumer. Le sentiment que
nous prenons la mesure des efforts à opérer, des changements de
comportements et de pratiques, en faveur d’une ouverture sur la
société, feront du Parti socialiste un parti attractif au plan des
valeurs. A chacun, tenté par la défection, sachons expliquer que la
caporalisation n’a jamais été une valeur socialiste.
Plus
nous serons collectivement exemplaires, plus nous serons en capacité
de rendre son attractivité à la vie politique et, ce faisant, faire
reculer l’abstention et contrecarrer la montée de
l’extrême-droite.
La
réussite future du Parti socialiste, le rayonnement de nos idées de
progrès nécessitent une volonté politique forte, le respect de
règles connue de tous, un profond renouvellement des pratiques et
des hommes. Nous y sommes préparés. Ne doutons pas une seule
seconde que les adhérents du Parti, à l’instar de nos
concitoyens, le réclament avec force.
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